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Distinction entre le lancer arrière « au clocher » et le lancer avant « en cloche » avec un poser « en parachute » ou « en cloche » de la mouche

Dans un article précédent sur ce blog consacré à Pierre Creusevaut, champion du monde français de lancer de la mouche et le lancer mouche HS-HL de Charles Ritz , je vous ai déjà parlé du lancer « au clocher » ou « au sommet du clocher » qui se caractérise par une très forte élévation du bras, de la canne et de la soie lors du lancer arrière ou arraché, sur un angle de 110/120° afin d’éviter un obstacle (un buisson, par exemple) situé derrière le lanceur. Le lancer vers l’avant, lui, s’effectue ensuite avec un changement d’angle pour pêcher normalement la truite en mouche sèche durant la journée ou la truite de mer en mouche noyée pendant la nuit (voir la première photo d’Hugh Falkus ci-dessus et la référence citée en bibliographie). Lors de cet article précédent je n’avais pas mis certaines photographies de Pierre Creusevaut, c’est  pourquoi je vous les mets dans et à la fin de cet article, car on ne dispose que peu de photos de ce grand champion.

Pour revenir au titre de cet article, le rappel du lancer vers l’arrière « au clocher » est volontaire, car il permet de bien mettre en avant le critère distinctif qui oppose ce dernier lancer, au lancer vers l’avant « en cloche » ou plus exactement « en demi cloche« , si l’on utilise la bonne dénomination, pour réaliser un poser « parachute » pour une mouche sèche ou un poser « en cloche » pour une nymphe légère. Parmi les auteurs cités en bibliographie, c’est l’autrichien Hans Gebetsroither, qui, selon moi, a le mieux décrit sommairement ce qui est présenté dans son ouvrage de référence, cité en bibliographie, à la page 83, comme : le « Parachute de Gebetsroither ». On constate bien souvent que les auteurs halieutiques ne présentent que la phase ou l’image finale de l’algorithme de leur recette de cuisine, sans vraiment décrire le processus chronologique de réalisation de leur recette, avec les bons ingrédients, pour obtenir le beau dessert — Une île flottante selon Auguste Escoffier ! — qu’ils nous présentent ! C’est pourquoi je vais légèrement compléter la description du lancer de Hans. Tout d’abord, pourquoi utilise-t-on ce type de lancer exécuté, en général, vers l’amont ? On utilise le lancer « en demi cloche » lorsqu’on est sur des eaux rapides de montagnes et que l’on veut, par exemple, poser une mouche sèche juste derrière un rocher situé au milieu de la rivière, là où précisément, il y a souvent une belle truite. Juste derrière le rocher, l’eau est calme, alors que de chaque côté du rocher, il y a deux veines de courant qui se rejoignent environ à deux mètres en aval du rocher pour former une veine principale. Par conséquent, si la soie, à l’issue du poser, est entrainée par l’un des courants, la mouche drague et devient inefficace pour leurrer le poisson. L’objectif est donc d’arriver à maintenir la mouche avec une flottaison tranquille pendant quelques instants, sans que sa dérive ne soit contrariée par les courants perturbateurs. En outre, la réalisation du lancer avant en élévation et en demi cloche et du poser d’une mouche sèche en parachute suppose qu’il n’y ait quasiment pas de vent, car le bas de ligne utilisé est plus long que d’ordinaire, avec une pointe plus longue et plus fine. Enfin, l’ensemble du lancer nécessite pas mal de compétences techniques. Voilà pour le décor !

S’agissant maintenant de la réalisation pratique de ce lancer, elle suppose que le lanceur effectue d’abord plusieurs faux lancers pour sortir suffisamment de ligne en l’air, dont la distance sera augmentée d’environ 2 à 3 mètres par rapport à la cible, c’est-à-dire là où la mouche doit atterrir juste derrière le rocher. Ensuite, sur le lancer vers l’avant final, le lanceur doit viser en hauteur sur un angle de 60° ou en direction des 11h00 et bloquer sa canne précisément à 11h00 afin que le soie, le bas de ligne et la mouche soient projetée en élévation pour s’étendre le long de la face visible d’une grosse cloche imaginaire située devant le lanceur (voir la position de la canne de Hans au moment du blocage avant, avec la deuxième photo ci-dessus). Après cela, à l’issue de l’extension de la ligne en raison du blocage avant, le lanceur abaisse sa canne à 9h00, ce qui entraine en premier la descente de la partie la plus lourde de la soie (par ex. la partie la plus grosse du cône d’une Triangle Taper) qui arrive sur l’eau. Le reste de la ligne descend après sans force en accordéon, puis le bas de ligne chute mollement en paquet ou en tas et enfin la mouche fait office de parachute pour freiner l’ultime descente de la pointe fine du bas de ligne. D’où l’expression de « poser de la mouche sèche en parachute« , à l’instar d’une graine de pissenlit qui tombe très lentement (voir la troisième photo ci-dessous). Lorsqu’un lanceur sait déjà faire cela, il peut même ensuite donner encore un peu plus de mou dans la ligne en abaissant la canne de la position de 9h00 jusqu’à la surface de l’eau ; et, en accomplissant entre-temps une petite manœuvre avec le pointe du scion comme le ferait Zoro sur le ventre du sergent Garcia ! Et pour gérer l’écoulement de la soie, il y a encore une autre petite astuce que je réserve pour mes clients. Bref, l’objectif global de l’ensemble de toutes ces opérations est d’obtenir une ligne de soie la plus détendue possible pour qu’elle soit absorbée progressivement par le courant, afin de donner du temps au bas de ligne pour se compresser en tas et à la mouche de se poser en parachute comme une graine de pissenlit, juste derrière le rocher, et d’y rester suffisamment longtemps pour être prenante, sans subir les contraintes hydrauliques du dragage.

Dans ce paragraphe, je vous présente les choses d’une manière différente pour expliquer pourquoi je pense que la dénomination de lancer vers l’avant « en demi cloche » est préférable à celle de lancer avant « en cloche », car elle est plus précise. Pour ce faire, je compare la description précédente à celle du lancer d’un basketteur pour atteindre avec son ballon le cercle du panier ou à celle d’un tennisman qui lobe son adversaire venu trop rapidement au filet et qui lifte la balle pour qu’elle passe au-dessus du joueur, afin de rebondir derrière lui juste avant la ligne de fond de court ! Dans ces deux hypothèses, les deux engins projetés suivent une courbe convexe totale qui a presque la forme d’une grosse cloche, tant sur la montée que sur la descente des deux côtés de la cloche. En revanche, dans le cas du lancer de la mouche évoqué plus haut, la soie ne fait que monter en élévation sur le côté visible d’une cloche imaginaire située devant le lanceur, mais elle ne redescend pas de l’autre côté sur la face cachée de ladite cloche. Elle est effectivement stoppée au sommet de la cloche imaginaire par le blocage avant du lanceur et par l’abaissement de sa canne vers la surface de l’eau. La soie retombe ensuite presque à la verticale — en revenant un peu vers le lanceur — et son trajet ne concerne que la moitié de la fameuse cloche imaginaire. On n’a donc bien à faire qu’à un lancer vers l’avant en « demi cloche ». Dans la pratique du lancer de la mouche, il existe cependant au moins une hypothèse où le lanceur exécute une courbe convexe totale lors d’un lancer vers l’avant : il s’agit du lancer courbe Ovale complet, avec la forme d’un œuf, utilisé pour lancer un tandem sèche nymphe, avec des nymphes un peu lourdes et cela d’une manière sécurisée. Mais dans ce cas de figure, la courbe a plus la forme d’un dôme que d’une cloche !

    Pour évoquer la dernière hypothèse mentionnée à la fin du titre de cet article, je dirai qu’elle ne concerne que le poser « en cloche » d’une nymphe légère ou de mouches noyées. Alors que le poser « en parachute » d’une mouche sèche a pour objet de freiner la descente dans l’air de la mouche sèche reliée à la fine pointe du bas de ligne qui sera détendue à la fin du poser pour éviter un dragage de la mouche ; le poser « en cloche » d’une nymphe légère ou de mouches noyées a pour objet inverse d’accélérer l’immersion dans l’eau de la nymphe ou des mouches noyées, précisément parce que la fine pointe du bas de ligne détendue ne bride pas la dérive naturelle sous l’eau des mouches et évite également que les mouches ne draguent. La réalisation d’un poser « en cloche » d’une nymphe légère peut être obtenue avec un lancer vers l’avant « en demi cloche » décrit plus haut. La réalisation d’un poser « en cloche » de deux mouches noyées ou de deux nymphes légères peut être obtenue à l’issue d’un lancer roulé « à la française », avec une canne à deux mains Switch Trout Spey HOH Overseas en 6 brins de 11’3 # 3 (action medium) et une soie Rio Single Handed Spey WF 6 (14,9 g) dont la tête fait 10,4 mètres avec un profil conique de Triangle Taper.

Pour finir au sujet du lancer vers l’avant en « cloche » avec un poser « en parachute » d’une mouche sèche, pour pêcher la truite dans des eaux rapides en direction de l’amont, le Maître Hans Gebetsroither, avait aussi dans sa panoplie de lancers, le lancer arrêté en arrière, décrit à la page 82 de son ouvrage cité en bibliographie. C’est un lancer arrière en direction de l’amont pour contrôler la dérive d’une mouche sèche vers l’aval et pêcher l’ombre dans des eaux rapides. Il nécessite un certain nombre de manœuvres — expliquées à mes clients lors de stages en Bourgogne ou de séjours en Autriche — pour sa bonne réalisation. Charles Ritz le mentionne indirectement dans son ouvrage de 1953 (cité en bibliographie), à la page 212, sous le nom de « Roulé aérien« , mais sa description est très elliptique. Il faut l’œil d’un lanceur expert maîtrisant le lancer courbe en demi ovale de Hans et les lancers Spey pour décrypter l’évocation ésotérique de Charles Ritz au sujet de ce lancer, dont la finalité est analogue à celui de son ami Hans : éviter que la mouche ne drague dans sa présentation au poisson ! Sacré « Charlie », comme le dit Joan Wullf, tu étais un petit coquin !

Bibliographie : Hugh Falkus : La bible du pêcheur de truite de mer, traduction en français par Pascal Charoulet, P.E.L., 1985, pp. 91 à 95 au sujet du lancer (en [sic] clocher, expression qui ne veut rien dire ?) « au clocher »,  ou plus exactement « au sommet du clocher », vers le ciel ou vers les étoiles, quand on pêche la truite de mer au crépuscule ou la nuit) ; Pascal Durantel et Didier Magnan : La pêche à la mouche, Artémis, 2005, p. 41 au sujet du lancer « en (sic) clocher », au clocher, au sommet du clocher ou vers le ciel ou les étoiles ; Pierre Barbellion : Truite, mouches, devons, Librairie Maloine, Paris, 1948, p. 500 au sujet du Lancer au clocher ou Steeple cast, encore nommé « lancer vertical d’obstacles » ; Frank Warlies : HANS GEBETSROITHER. Eine Leben dem Fliegenfischen (Une vie de pêche à la mouche). Photos Horst Hansen, Nova Media, Berlin, 1984, pp. 83 à 85, Le parachute de Gebetsroither où Hans présente, avec certains détails, son lancer vers l’avant en élévation et « en demi cloche » et son blocage à 11h00 suivi de l’abaissement de la canne pour obtenir le poser « en parachute » d’une mouche sèche ; Charles Ritz [1891-1976] : Pris sur le vif, (1ière édition, Librairie des Champs-Elysées, Paris, 1953). Réédition de Claude Tchou – Bibliothèque des Introuvables, Paris, 2002, Avant-Propos d’Éric Joly et Préface de Léonce de Boisset, p. 212, au sujet de son lancer parachute ; A Fly Fisher’s Life. The Art and Mechanics of Fly Fishing (New édition revised and greatly enlarged), foreword by Ernest Hemingway et introduction by Arnold Gingrich, Max Reinhardt Ltd, 6 ième édition anglaise, London, 1972, p. 28, au sujet de son lancer parachute ; Joan Wulff : Joan Wullf’s Fly Casting Techniques, Illustraded by Francis W. Davis, Lyons & Burford, New-York, 1987, pp. au sujet du High Angle Cast, Parachute Type ; Le lancer de la mouche, ses différentes techniques, traduction de Gabrielle et Christian Fourquet, Gerfaut, Paris, 1997, pp. 149 et 150, au sujet du « lancer (sic) parachute et du poser parachute » ; Philippe Boisson : De la pêche à la nymphe, La Vie du Rail, Paris, 2010, pp. 313 et 314 au sujet du poser en « parachute » [pour une mouche sèche] et du poser « en cloche » [pour une nymphe] ; Claude Ridoire : Mouche noyée légère à deux mains. 8’6 par Pêches Sportives, n° 13, avril, mai, juin 2021, p. 76, colonne de droite en haut : « Cette pratique de pêche légère demande de poser les mouches « en clocher (sic) » » (« en cloche » est une dénomination préférable).

stage de pêche à la mouche

stage de pêche de la truite à la mouche en Autriche – Tyrol

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